Mon premier 3 étoiles – Pic à Valence


Restaurant PicJ’ai eu la chance de profiter tout récemment de mon cadeau d’anniversaire : un repas chez Pic, à Valence. Mon premier repas dans un restaurant estampillé 3 étoiles au fameux guide Michelin… Ce fut une très bonne soirée, car on a très bien mangé ; un peu trop, par contre, mais c’est un peu la loi du genre… Je ne peux pas comparer avec d’autres restaurants de la même catégorie, mais c’est très certainement le restaurant de ma connaissance dans lequel les plats sont les plus aboutis : quasiment rien à redire sur l’ensemble de plats, pour lesquels les goûts sont très justement et exactement dosés. C’est tellement abouti qu’on ne sent pas les efforts qu’il y a derrière, les plats paraissent d’une grande simplicité – ce qui n’est sans doute pas le cas du tout…

Trois générations se sont succédé aux fourneauxOn accède à la salle de restaurant en traversant un salon chaleureux aménagé en petits coins privatifs, décorés de photographies « historiques »  notamment avec Jacques Pic, le père d’Anne-Sophie, l’actuelle chef du restaurant. La salle elle-même est décorée dans une tendance légèrement  baroque nouveau genre (lustre et bougeoirs en cristal, papier peint blanc à motif en relief, miroir), mais teintée de sobriété par des panneaux de bois plaqués et par les formes très épurées des glaces. La moquette marron foncée à décor seventies pourrait jurer, mais c’est en fait très harmonieux.  La verrerie sur la table est assortie à l’ambiance.

Bon point aussi pour le service, pas trop guindé (j’aurais pu prendre quelques photos sans que ce soit trop la honte, si j’avais pris mon appareil) et surtout souriant. On vous explique les plats avec le sourire, on vous demande gentiment votre avis.  Le ballet des serveurs est discret : pas de serveur qui monte la garde, mais on vous ressert régulièrement quand les verres se vident.  Le service est rapide : on n’a jamais eu l’impression d’attendre. Arrivés à 20h00, nous sommes repartis sur les coups de 23h15, après presque 10 plats, ce qui est tout à fait comme il faut.

Le repas a commencé par un apéritif. J’ai pris un jus de fruit (qui n’avait rien d’extraordinaire), et Marc a suivi le choix du sommelier avec un verre de Condrieu. 4 petits amuse-gueule accompagnaient nos verres : une bille de foie gras, une sorte de macaron blanc  à points noirs à je ne sais-plus-quoi, un très étonnant cube de guimauve à la cacahouète (un chamallow goût Curly !) et un quatrième que j’ai déjà oublié.  Nous avons choisi nos plats en sirotant nos verres ; j’avais bien évidemment la carte sans prix : que c’est difficile de choisir dans ces cas-là !  Nous avons tous deux opté pour un menu « Actualité », qui semblait donner un bon aperçu de la cuisine du restaurant. On peut aussi prendre un menu « traditionnel », qui reprend certains des plats qui ont fait le succès du restaurant du temps de Jacques Pic, ou choisir à  la carte, dans laquelle un plat de cabri m’a longtemps fait de l’œil… Une fois le menu choisi sur la carte, on vous apporte un petit menu personnalisé à emporter chez soi, qui reprend votre menu.

Le menu qu'on peut rapporter chez soiMise en bouche : crème de foie gras (façon crème brûlée) servie avec une mousse de pomme. Il s’agit d’un classique, visiblement. Très bon, pas écœurant pour un sou ; étonnant et délicieux  mélange du fois gras avec la couche caramélisée de la crème brûlée.

Les oursins violets: langues et crémeux d’oursins en fine gelée d’oseille, coulant de jaune d’oeuf au poivre cubèbe.  Sans doute le plat qui m’a le moins plu. Je m’attendais à trouver la saveur salée de l’oursin mais c’est l’oseille qui prédomine un peu trop. J’aime beaucoup l’oseille, donc j’ai aimé le plat ; mais je trouve préférable de manger les oursins à part pour mieux profiter de leur goût. Je ne sais pas à quoi étaient les petits ronds craquants, mais c’est un vrai plus pour le plat, tant un niveau goût que texture.   C’est le plat à photographier par excellence, avec le jaune d’œuf qui se détache délicieusement  sur le vert vif de la gelée d’oseille.

La betterave plurielle : textures fondantes et crémeuses au café Blue Mountain, acidulée d’épine-vinette. Comme dirait l’autre « je pensais pas être ému par une betterave, ben si ». Un plat étonnant, composé de divers morceaux de betteraves cuisinés différemment, avec des baies d’épine-vinette séchées. J’ai commencé par goûter chaque présentation à part, et cela n’avait rien de très excitant. Et puis j’ai mélangé la mousse, les baies, les betteraves tièdes, et là, miracle et magie ! C’était délicieux. La touche de café  dans la présentation en mousse n’est sans doute pas pour rien (ça avait très bien fonctionné avec les gnocchi de Séville), les baies acides sont indispensable pour titiller les papilles. Une belle réussite, troisième dans mon top 3.

La Saint Jacques normande: cuisinée en légère amertume de réglisse, anguille fumée, tombée de trévises rosa et vénitienne. Les noix de St Jacques étaient assez peu cuites (sans être crues), ce qui m’a un peu surpris sur le coup. Elles étaient cuites de façon parfaitement uniformes, ce qui est une grande réussite de ce plat. La sauce, parfumée à l’anguille, ajoutait un goût de mer, et le léger goût de réglisse de petites feuilles vertes dont j’ai oublié le nom se mêlait joyeusement à tout cela. Quand on parle de sauce, il ne faut pas voir une sauce épaisse, mais plutôt un bouillon léger, qui est ajouté sous vos yeux quand on apporte le plat.

Le menu "Actualités"Le Saint Pierre de petits bateaux: à la vapeur douce, asperge de Mallemort minute, jus de cuisson perlé à l’huile de menthe poivrée et truffe noire.  Mon plat préféré de la soirée. J’étais un peu dubitative sur la truffe : je ne suis pas une spécialiste, mais le peu que j’en ai goûté me laisse le souvenir d’un parfum subtile  mais très entêtant. Or ici, quand j’ai goûté le plat, je n’ai pas retrouvé cette sensation, j’avais l’impression de ne pas sentir le goût !  Par contre, le poisson, les asperges et le parfum léger de menthe, tout cela était parfait. Mention spéciale aux asperges, qui étaient vraiment justes bien comme il faut – je ne suis pas trop adepte des cuisson al dente, mais là, c’était top – et avec beaucoup de goût. En dégustant à la cuillère la sauce délicieuse au fond de mon assiette, je me suis rendue compte que la truffe joue dans ce plat un rôle d’exhausteur de goût, exhausteur de luxe ! On pourrait aussi penser que la sauce est trop salée (j’avais lu des critiques dans ce sens sur Internet) ; c’est vrai que  c’est salé, mais pas trop salé, ou alors trop salé à la manière dont les huîtres sont salées, comme du sel naturel. Je me suis ré-ga-lée.

Trou normand, ou plutôt trou champenois : une crème (ou était-ce une mousse ?) de clémentine sur un granité de Champagne. La crème de clémentine semblait avoir capté l’essence même du fruit, c’était très, très, très bon ; et il m’en a coûté de laisser le granité de côté, car il était tout bonnement excellent ; mais son goût alcoolisé m’a très clairement fait comprendre qu’il valait mieux que je le laisse si je voulais profiter du reste du repas… D’ailleurs, je ne vous cause pas de vin , vu que je n’en bois pas. Marc a suivi le sommelier avec un verre d’Hermitage Blanc Chante-Alouette 2007, mais il a préféré le Condrieu je crois ; il n’est pas passé au rouge sur la fin du repas vu qu’il n’avait pas fini ses verres.

Le chevreuil : noisette rôtie au poêlon, transparence de pamplemousse confit maison. Un filet de chevreuil rosé  – on nous avait demandé la cuisson en début de repas, la cuisson normale étant rosé –  avec une sauce cacaotée, pamplemousse confit ; servi avec une mousseline de pommes de terre, à part.   En goûtant la sauce, je n’ai pas réellement senti le goût de chocolat, et elle était un peu trop amère, à la limite du goût de brûlé, si j’exagère. Mais en mangeant la viande *et* la sauce : et bien c’était délicieux, et plus encore en y adjoignant un petit morceau du pamplemousse confit. J’ai tout mangé sans m’en rendre compte, la viande était d’une grande tendreté. Il n’y a que la mousseline que je n’ai pas finie : je commençais à ne plus avoir trop faim finalement, et la richesse de la mousseline (ils n’ont pas lésiné sur le beurre, clairement)  m’a convaincu de m’arrêter si je voulais finir le repas.

Anne-Sophie PICLes fromages frais et affinés : plutôt que de me réserver pour le dessert, j’ai pris 2 bouts de fromage, histoire de profiter  un peu de mon délicieux pain à l’huile d’olive maison que j’avais depuis le début du repas  – on nous a aussi proposé du pain blanc ou de seigle avec le fromage. Rien à redire  sur le Beaufort et le chèvre que j’ai pris, mais comme on a de très bons fromages à la maison, je n’ai pas eu de découvertes fondamentales. Prendre du fromage, c’était un peu la boulette,  car avant le dessert il y a  le …

Pré-dessert :  une compote de poire, surmontée d’une glace (dont je ne me rappelle plus le parfum) et une panna cotta au yuzu.  La panna cotta était prise dans une coque, style demi-sphère en chocolat, mais je n’en jurerais point ;  on avait un mariage de goûts très subtiles entre le parfum parfait de la poire, et le goût assez doux du yuzu, sorte de citron japonais, qui a eu ses heures de gloires sur les blogs culinaires, et auquel je n’avais jamais goûté. Bon jeu de textures aussi avec la compote très douce (on ne sentait pas le grain du fruit), la fraîcheur de la glace , le fondant de la panna cotta et le croquant de la coque. Bref, le pré-dessert, c’est mon préféré numéro 2. Il était accompagné de 3 mignardises : un macaron au citron (très bon, mais avec un fort goût d’amande, et comme je n’aime pas ça, j’en suis sortie un peu écoeurée), et deux ovnis, dont un petit gâteau tout pailleté très bon lui-aussi.

Le lacté : variations de saveurs autour du lait et de la crème épaisse, crème glacée à la levure.  Avec tout ça, je n’avais plus trop faim quand cette voie lactée est arrivée, et c’est une pitié. Là, on quitte l’apparente simplicité, on a quelque chose de clairement très construit (à vrai dire, je n’ai jamais vu de dessert d’apparences simples) : une croûte brillante et irisé, qui laisse passer une mousse de lait grâce à de large trous. Cachés là-dessous, un biscuit , une crème au mascarpone, une crème glacée ..  Un dessert autour des laitages, tout blanc, très original. La mousse de lait a un pur goût de lait, on a un agréable mélange de croquant, de mousseux, de biscuité, de froid… Mais je crois que je n’avais clairement plus assez faim pour l’apprécier convenablement, dommage…

Après tout ça, nous avons lézardé à table, puis nous sommes partis doucement en visitant les salons et en regardant les vieilles photos au mur (dont une amusantes représentant une floppée de grands chefs en train d’éplucher des patates), puis la collection de guides Michelin depuis 1900. Il a bien fallu régler l’addition, mais comme j’étais invitée, ça n’a pas trop entamé mon porte-monnaie. Nous sommes partis nous coucher bien contents et repus, avec l’envie d’y revenir pour goûter ce fameux cabri…

    

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